C'est d'abord une pièce de théâtre. Des dialogues, et peut-être alors des répliques, des morceaux de films. Des choses qui pourraient être dites dans un film, qui le seront peut-être. Le film alors sera.
ELLE. — Tu disais ?
LUI. — Je disais ?
ELLE. — Tu ne disais rien !
LUI. — Je ne sais plus.
ELLE. — Ha, et de quoi on parlait avant ?
LUI. — Avant, on ne parlait pas.
ELLE. — Et encore avant ?
LUI. — Encore avant, je crois qu’on parlait encore moins.
ELLE. — (Enjouée et vivace)… de chaussures… de bananes… de la pluie…
LUI. — Et du beau temps !
ELLE. — Tant pis… peu importe.
LUI. — Après tout…
Je sais ! je ne sais plus de quoi nous parlions, mais je sais de quoi nous pourrions parler.
ELLE. — De ?
LUI. — De toi !
ELLE. — De moi ?
LUI. — Pourquoi pas !
ELLE. — Oui… hé bien je t’écoute !
LUI. — Tu m’écoutes !
ELLE. — Tu veux qu’on parle de moi ; je t’écoute. Ou tu veux que je parle de moi, ou tu veux parler de moi !
LUI. — Très bien ! depuis quand tu habites ici ?
ELLE. — Depuis que j’ai déménagé.
LUI. — Depuis que l’on s’est quitté l’an passé ?
ELLE. — L’an passé ?
LUI. — Un an !
ELLE. — Un an, et on s’est quitté.
LUI. — Non, dix ans et on s’est quitté.
ELLE. — On s’est quitté depuis un an après dix ans.
LUI. — Précisément !
ELLE. — Un an, hum hum !
LUI. — Comme tu dis, hum hum !
ELLE. — Depuis que tu m’as quitté.
LUI. — Toi aussi tu m’as quittée.
ELLE. — Oui alors on est quitte !
LUI. — Quitte ! et on se revoit.
ELLE. — Non, aujourd’hui on se voit, et on se reverra peut-être plus tard.
LUI. — Plus tard.
ELLE. — Mais parlons un peu de toi maintenant !
LUI. — De moi ?
ELLE. — Oui, on se voit aujourd’hui car tu m’as téléphoné !
LUI. — Oui, disons que l’on s’est téléphoné, car je t’ai téléphoné et tu m’as téléphoné.
ELLE. — Oui mais quand même il y avait un ordre ; c’est toi qui a commencé.
LUI. — C’est vrai, je t’ai téléphoné pour éviter que tu ne le fasses.
ELLE. — Je l’ai fait, deux jours avant, ou peut-être la veille, mais tu n’y étais pas.
LUI. — Maintenant j’y suis. Me voilà !
Ils marchent, pendant cette scène, de cour à jardin. Il est dans la chambre, et elle une pièce voisine. Un des deux en coulisse.
LUI. — Je quitte seulement la maison, je serai donc en retard, si tu quittes toi aussi seulement la maison, tu seras en retard, alors nous serons à l’heure.
ELLE. — Seulement j’ai plus de chemin que toi à faire, alors ne vas pas trop vite, fais le tour par le musée. (Elle regarde une carte sur son mur. La carte peut apparaître des coulisses, comme par magie, et repartir aussitôt après.)
LUI. — D’ailleurs on pourrait le visiter cette après-midi.
ELLE. — Oui, je voulais y aller aussi.
LUI. — Fais-toi belle alors, je veux dire particulièrement belle si tu vas voir l’exposition Van Gogh. Il a peint beaucoup d’hommes et l’expo montre essentiellement les portraits qu’il a peints.
ELLE. — Ah oui, c’est pour ça que ce sont surtout les femmes qui vont voir ses expositions ! et si peu d’hommes.
LUI. — Sûrement. Les hommes vont surtout voir Chanel, non ?
ELLE. — Les défilés, oui évidemment ! (Image d’hommes devant les vitrines de la boutique Chanel à Paris.)
Ext. — Dans la rue, il y a des arbres à fleurs.
ELLE. — J’aime beaucoup ces arbres à fleurs.
LUI. — Oui, ils sont très jolis.
ELLE. — J’aime beaucoup ces fleurs aussi.
…
LUI. — Ce que j’aime avec la mode en été, c’est que les femmes sont pleines de couleurs, elles portent des robes à fleurs (il regarde ailleurs puis vers elle), enfin toutes les femmes ne portent pas de robes à fleurs.
ELLE. — Mais là on est quand même en hiver tu sais !
LUI. — Oui, mais elle vient sûrement d’Argentine, et là-bas c’est l’été en ce moment.
ELLE. — Hum hum !
…
…
LUI. — Par où ?
ELLE. — Par là ! Ce matin, en marchant par ici, je me suis souvenue que tu aimais cet endroit.
LUI. — Oui, et je l’aime toujours.
ELLE. — J’y étais hier.
LUI. — Mais tu sais qu’aujourd’hui n’est plus hier.
ELLE. — Oui, mais je savais qu’hier allait être aujourd’hui. Tu es parti tôt ce matin ?
LUI. — Oui, j’avais deux trois courses à faire, pour midi.
ELLE. — C’était bien ?
LUI. — Oui, c’était bien. Il y avait plein de couleurs.
ELLE. — Ah oui, sur les légumes ou à côté des légumes.
LUI. — Oh partout, j’ai même essayé de prendre un livre sans la couleur, mais impossible, la couleur venait avec, même avec le café que j’ai bu, la couleur est venue avec.
ELLE. — Mince, tu as avalé la couleur du café.
LUI. — Oui, il y a du noir en moi.
ELLE. — Ça arrive, et dis-moi, si on mange une tomate jaune, et une tomate bleue, une fois dans l’estomac, ça fait une tomate verte ?
LUI. — Oui oui certainement.
Un tout petit temps
ELLE. — Et tu fais quoi maintenant ? tu avais quelque chose de prévu en dehors du musée ?
LUI. — En dehors du musée non, mais en dedans du musée non plus d’ailleurs, mais là je vais boire un café.
ELLE. — Seul ?
LUI. — Oui, enfin, non, avec toi, tu veux venir avec nous ?
ELLE. — (Sourire) Oui j’imagine que vous êtes seul !
LUI. — Oui, à peu près… tu le sais depuis le temps que tu vis avec moi.
ELLE. — Enfin depuis un an, on n’a pas vécu grand chose !
LUI. — Si, on l’a vécu séparément.
ELLE. — Oui, ça a son charme aussi, et on va où ? ou on ne va pas où ?
LUI. — Je ne sais pas, allons boire un verre, un café, et l’on verra bien où l’on est.
ELLE. — Oui, au moins on ne sera pas perdu ailleurs.
Ils sortent du café.
LUI. — On marchait dans le sens-là.
ELLE. — Tu es sûr ? non je crois que c’était plutôt comme ça.
LUI. — Oui, mais quand même dans le même sens, pas toi comme ça et moi comme ça.
ELLE. — Je ne sais plus, avec le temps on a dû changer de sens dans la mémoire.
LUI. — D’ailleurs regarde, si on marche tous les deux l’un à côté de l’autre, comme ça (les deux se retournent en même temps), on ne peut jamais vraiment se rencontrer, toi tu vas tout droit, moi je vais tout droit, c’est comme deux droites parallèles.
ELLE. — Non, parce que depuis Galilée la Terre est ronde, et si je trace deux droites sur ta tête, elles vont finir par se toucher, sur le nez.
LUI. — Tu préfères pas plutôt la bouche !
ELLE. — Si mais il y a trop de monde qui nous regardent.
LUI. — Ah !
ELLE. — Et puis, si deux personnes marchent l’un à côté de l’autre, c’est qu’ils se sont déjà rencontrés.
LUI. — Non, deux inconnus peuvent marcher l’un à côté de l’autre.
ELLE. — Alors s’ils ne se connaissent pas, ils n’ont pas besoin de se connaître.
LUI. — Tu as raison, c’est plus simple comme ça, ça évitera qu’ils se chamaillent avec sa belle-mère.
ELLE. — C’est vrai, on ne se chamaille jamais avec le beau-père. (Légèrement ironique).
LUI. — He non, il cause à la voisine.
ELLE. — Voilà pourquoi la belle-mère chamaille.
LUI. — C’est tragique, non.
ELLE. — Non, c’est dramatique.
Ce jour-là tu avais un grand parapluie, comme ça !
LUI. — Comme ça ! (Il montre un parapluie qu’on lui donne des coulisses peu avant).
ELLE. — Oh ! (Surprise de voir le parapluie.)
LUI. — Mais quel jour ?
ELLE. — Ah je ne sais plus… attends (elle sort un papier, elle mime bien sûr) ah ben il n’a pas précisé dans le texte.
LUI. — Voilà encore un écrivain qui rêve en écrivant.
ELLE. — Bon vas-y reprends à « quel jour ».
LUI. — Quel jour ?
ELLE. — Le jour où l’on a marché ensemble, le premier, ou le deuxième.
LUI. — Où tu m’as fait marcher tu veux dire !
ELLE. — Ah non voilà, c’est le deuxième jour. (Si possible deux figurants jouent une scène, du passé, à cour ou jardin, ils portent donc les mêmes habits et elle le fait marcher au sens propre.)
LUI. — Et là quand tu me faisais marcher. (La scène continue des figurants.)
ELLE. — Je te taquinais ce jour-là. Tu parlais à la voisine, alors j’ai fait ma voisine aussi. (La scène continue des figurants.)
LUI. — Oui, celle de l’autre côté alors, et sous mon parapluie !
ELLE. — Il était grand.
LUI. — Et alors ?
ELLE. — Eh alors il était grand.
LUI. — Ben oui, les nuages étaient grands eux aussi, et puis c’était pour protéger aussi mon humeur, avec tous ces nuages, qui étaient un peu aussi dans ta tête je me souviens.
ELLE. — Oui, je me souviens mais aujourd’hui avec le soleil, ton parapluie est décoratif, et les nuages ne sont plus dans ma tête.
Peut-être un nuage passe au-dessus de lui, uniquement.
LUI. — Oui, mais puisque tu en as parlé, il est apparu.
ELLE. — Tu pourrais presque le mettre devant le soleil, pour faire un peu d’ombre. (Elle approche sa main du soleil et le couvre, le soleil sera donc proche d’eux.)
LUI. — On peut aussi retirer le soleil et le remplacer par une bougie non ?… je vais voir s’ils en ont derrière, en coulisse.
Pendant ce temps, elle regarde, pense… Il revient, allume la bougie et des grilles descend un fil pour attacher, accrocher la bougie.
ELLE. — Ça devait être joli au début du XIXe siècle de voir les villages éclairés aux bougies, en pleine époque romantique… je veux dire depuis un avion.
LUI. — (Sourire.)
Quand il allume la bougie, les lumières sont éteintes ou très peu allumées. Ils s’assoient sur un banc.
ELLE. — Ah, je me rappelle maintenant que c’est ici que l’on s’est vraiment parlé pour la première fois.
LUI. — Tu veux dire qu’avant ça on ne parlait pas vraiment, et que l’on faisait semblant de parler !
ELLE. — Je crois que l’on se regardait plutôt, ou que l’on cherchait nos paroles.
LUI. — On cherchait comment se dire les choses, c’est ce que tu veux dire.
ELLE. — Oui, et alors on se regardait pendant ce temps, enfin je te regardais complètement ; et toi tu me regardais seulement à moitié.
LUI. — Eh oui, j’étais blessé à l’œil… gauche (et il met sa main sur l’œil droit, avant de se rendre compte qu’il s’est trompé).
ELLE. — Haha menteur, tu étais timide, plutôt.
LUI. — Plus tard j’étais timide c’est vrai, mais tant que je ne t’avais pas parlé, je n’étais pas encore timide.
ELLE. — Et puis surtout on ne riait pas entre nous.
LUI. — C’est vrai, nous étions très sérieux, si sérieux.
…
Voilà, c’est là que tu étais assise le premier jour, ou plutôt la première fois que nous nous sommes parlé, et moi j’étais… là.
NOIR
Le plan de la scène 4, ils parlent mais sans voix, 2/3 s. Avoir un élément du décor distinctif, et donc aussi pour la scène 4.
NOIR
ELLE. — Et je me souviens surtout que l’on ne s’est rien dit pendant plus de 30 s, c’était long, très long.
LUI. — Non non, c’est toi qui n’a rien dit… moi j’essayais de t’écouter, enfin je t’écoutais, mais tu ne disais rien, tu ne parlais pas non plus d’ailleurs.
ELLE. — Je pensais sûrement.
LUI. — Alors évidemment c’était un peu calme, silencieux, extrêmement silencieux entre nous.
ELLE. — Oui, tu voudrais qu’il y ait un haut-parleur entre nous ?
LUI. — (Sourire.)
ELLE. — Nous n’étions pourtant pas si jeunes.
LUI. — Non, mais nous n’étions pas si vieux quand même, disons que nous avions déjà l’âge de dire des choses.
ELLE. — Oui, disons le !
LUI. — Tu le dis ?
ELLE. — Je le dis !
LUI. — C’est quel âge d’ailleurs.
ELLE. — Oh quelque part entre l’enfance et Alzheimer.
LUI. — Ah ben ça va.
ELLE. — Et puis peut-être que l’on n’avait pas l’âge de dire les bonnes choses encore, ou que l’on n’avait pas grand chose à dire.
LUI. — Ou savoir comment dire ces choses sans chercher midi à 14 heures.
ELLE. — Oh, midi à 14 heures, tu peux le trouver, si tu vas vers la Russie, ils ont deux heures d’avance.
LUI. — Oui… (sourire).
ELLE. — …
LUI. — Il est quelle heure maintenant ?
ELLE. — Ah ! s’il est quelle heure c’est forcément maintenant ! non !
LUI. — (Sourire) En effet ! C’est vrai que l’on ne demande jamais l’heure qu’il était !
ELLE. — (Imitant) Pardon monsieur, vous pourriez me dire l’heure qu’il était !
LUI. — (Sourire) Ou l’heure qu’il sera.
ELLE. — (Imitant) Pardon monsieur !
LUI. — Ou madame !
ELLE. — Ou mademoiselle, vous pourriez me dire l’heure qu’il sera !
LUI. — Ce serait amusant.
ELLE. — Oui…
Dis-moi !
LUI. — Oui je te dis.
ELLE. — Si tu as du temps, on pourrait faire l’amour, non !
LUI. — J’ai du temps, et je peux faire l’amour, oui ! mais on pourrait, ou nous pourrions !
ELLE. — Comme tu veux.
LUI. — Parce que si tu dis « nous pourrions », je sais que tu parles de nous deux, et de préférence ensemble, et quand tu dis « on », ça peut être toi là-bas et moi ici, c’est un peu plus impersonnel tu comprends.
ELLE. — Tu tires un peu sur les cheveux là, non ?
LUI. — Et tu as les cheveux courts (si elle a les cheveux courts, et il dira « longs » si elle les a longs). Bon… si tu veux, comme il est déjà tard (l’horloge indique 20 h), nous pourrions faire l’amour toute la nuit, ou la moitié seulement.
ELLE. — Oui, ou alors toi la première moitié de la nuit, et moi la deuxième.
LUI. — Alors au même endroit, que ça puisse s’emboîter dans nos souvenirs. Je veux dire que nos souvenirs puissent coïncider.
ELLE. — Bon, par quoi on commence ?
LUI. — He ben déjà sans eux.
Ils arrivent en chuchotant, on ne comprend pas ce qu’ils disent. Ils s’arrêtent et se placent, comme s’ils suivaient les indications d’un metteur en scène. Debout l’un face à l’autre.
LUI. — Oh ! j’y pense, regarde, j’ai inventé une nouvelle danse… tu mets ta main comme ça, et tu fais ça… tu ne rigoles pas ?
ELLE. — (Sourire) Pas absolument.
LUI. — De toute façon c’est pour une seule personne… bien sûr il peut y avoir plusieurs « une seule personne », sur une piste de danse, même si la piste n’est pas nécessaire. Bon, c’était simplement une nouvelle danse. (Il réfléchit 2/3 secondes.)
Tu veux peut-être jouer aux échecs ?
ELLE. — Oui, pourquoi pas, mais il nous reste du temps ?
LUI. — Oui je crois, attends je vais demander (il va en coulisse). Ce qui est bien avec les coulisses, c’est qu’ils savent vraiment tout, et mieux que nous et ils le savent avant nous. Ils savent précisément ce qui va se passer dans 10 minutes, nous en sommes incapables.
Ils s’asseyent au sol, à l’avant-scène. Ils jouent.
LUI. — Je prépare un thé ?
ELLE. — Oui s’il te plaît.
Un temps, et ils prennent leur temps dans les dialogues puisque ils jouent aux échecs. Il est concentré et n’écoute pas vraiment ce qu’elle lui dit.
ELLE. — Au fait j’ai croisé Robert hier.
LUI. — Robert hier ?
ELLE. — Oui.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Il marchait.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Moi aussi je marchais.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Et nous nous sommes croisés, comme ça. (Elle mime avec ses mains.)
LUI. — Hum hum.
ELLE. — C’est-à-dire que quand l’on s’est rencontrés, sa direction et la mienne ça faisait comme ça (elle mime à nouveau), une croix, pas nécessairement une crois chrétienne, peut-être qu’après ça tournait, pour lui ou pour moi, ou en rond.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Oui, comme ça, en rond, c’était une croix ronde.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — (Pendant ce petit monologue, elle peut faire semblant de repasser, en mimant.) Et comme j’arrivais comme ça (signe) et lui comme ça (signe) alors on dit que l’on s’est croisés !… Quand je dis « on dit », c’est une expression tu comprends ! Tu sais les expressions, comme pas exemple « Parle à un sourd ! », « Muet comme une carpe ! », ou celle-là un peu vulgaire, tu sais « Parle à mon cul (« cul » n’est pas prononcé mais remplacé par un bip) ma tête est malade ! ».
Ah le bip c’est quand on dit un gros mot, un peu comme à la télévision, ou au cinématographe, maintenant ils ont réussi à le mettre au quotidien, dans la vie de tous les jours, dans la rue, au café, à la maison. Quand tu dis un gros mot, il est remplacé par un bip. C’est pratique.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Remarque que la 1e expression ; « Parler à un sourd ! » est un peu sexiste, non ? Pourquoi on ne dirait pas « Parlez à une sourde ! » La deuxième c’est mieux elle utilise le féminin et le masculin, un muet et une carpe. Ça ferait un drôle de couple ça, tiens j’y pense, une carpe et un muet. La 3e aussi « mon cul, ma tête ». Tiens, le bip n’a pas sonné, « mon cul », « mon cul » (le bip ne sonne pas).
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Tu vois, le croisement, comme ça, ça fait une croix. (Elle peut faire un oiseau avec ses mains.)
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Et après il s’est envolé.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — J’ai repris la conversation un peu en arrière. Comme ça il s’est envolé ! (Signe)
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Pourtant ce n’est pas un oiseau… mais il volait, même très haut.
LUI. — Hum hum… il volait ? il a volé quoi ?
ELLE. — Qui ?
LUI. — Tu viens de dire qu’il volait.
ELLE. — Ah non je n’ai rien dit !
LUI. — Mais si tu as parlé !
ELLE. — La dernière chose que j’ai dite… c’est quand tu voulais préparer un thé, j’ai dit « Oui s’il te plaît. »
LUI. — Mais si tu as parlé !
ELLE. — Non non, enfin je ne crois pas… je pensais tout haut peut-être.
LUI. — Pas possible !
ELLE. — Non vraiment, ou alors je n’ai pas fait attention que je parlais. Tu sais dès fois quand on pense très fort on se met à parler.
LUI. — Ce n’était pas toi qui parlais ?
ELLE. — Je ne sais pas, c’était peut-être la voisine.
LUI. — Elle est morte la voisine.
ELLE. — Ah oui c’est vrai, elle aussi. Comme on ne l’entend plus, j’ai oublié qu’elle était morte. Alors c’est la voisine de la voisine.
LUI. — La voisine de la voisine est un voisin.
ELLE. — Ah ! alors je ne sais pas. Tu étais très concentré, tu as dû entendre des voix. Ça arrive, c’est déjà arrivé, à une voisine d’ailleurs. Elle habitait là-bas, à Orléans.
LUI. — On a une voisine qui habite à Orléans ! oh ! c’est un peu loin pour qu’elle soit notre voisine, non !
ELLE. — Oui, tu sais aujourd’hui tout est possible avec les voisines, c’est moderne.
LUI. — Ah !
ELLE. — Et tu l’avais connu comment ?
LUI. — La voisine ?
ELLE. — Non, Robert !
LUI. — Robert !
ELLE. — Oui
LUI. — Au conservatoire, en classe de solfège.
ELLE. — Hum hum.
LUI. — Je voulais lui demander de quel instrument il jouait.
ELLE. — Hum hum.
LUI. — J’étais devant il était derrière. Je me suis retourné, il ne s’est pas retourné. Voilà.
ELLE. — Hum hum.
LUI. — Tu m’écoutes ?
ELLE. — Hum hum.
LUI. — Pauline !
ELLE. — Hum hum.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Tu disais ?
LUI. — Pauline !
ELLE. — Oui c’est moi !
LUI. — Oui c’est pas moi !
ELLE. — Et son frère, on ne le voit plus beaucoup.
LUI. — Le frère de Robert, non… plus beaucoup depuis qu’il est mort.
ELLE. — Il est mort ! un peu, beaucoup, à la folie, passionnément. Lui aussi, ça fait 2 morts en 5 minutes, c’est un peu rapide non ! si tous les gens sont morts parce qu’on ne les voit plus, il ne doit pas rester grand monde (elle regarde le public).
LUI. — Ça doit faire longtemps que je n’ai plus joué aux échecs.
ELLE. — Oui je crois aussi.
LUI. — Hum hum.
ELLE. — Tu veux peut-être jouer aux dames ?
LUI. — Oui, pourquoi pas. Je crois que je gagnais plus souvent aux dames.
ELLE. — Oui je crois me souvenir aussi.
LUI. — Quand on s’est connu !
ELLE. — Oui, tu jouais mieux aux dames puisque tu m’as gagnée.
LUI. — (Sourire) Oui c’est vrai, depuis je perds toujours aux femmes.
Ces dialogues ne sont pas publiés. Ils aimeraient être entendus, et écoutés au moins un petit peu sur une scène. Même si la scène est petite ; ils ne sont pas difficiles, même s'ils sont un petit peu difficiles toutefois, mais pas tous, et pas toujours !